Le feu est au cœur de toutes les cérémonies. Même si vous n'allumez qu'un lumignon sur votre table, vous n'avez pas oublié de le déposer. Un autel de pratiques sans flamme, c'est un autel qui ne porte pas les intentions pour lesquelles il a été élevé.
Comme tous les éléments, comme chacune des directions de la roue de médecine, le Feu s'apprivoise, nous apprivoise, se révèle au fil des pratiques et du temps. En une vie, on n'aura pas suffisamment de temps pour intégrer son enseignement puissant et révélateur. Car le Feu révèle. il nous révèle à nous-mêmes, parce que face à lui, nous sommes tout nus. Il est impossible de lui cacher des choses et de faire semblant. Il nous rappellera toujours à l'ordre.
Il n'est jamais banal. Dans un poêle à la maison, dans une cheminée de campagne, au grand air pour les herbes, même les moins connectés d'entre nous sont fascinés et captés par son énergie. Il suscite de la peur parfois, car il est difficilement contrôlable.
Approcher le Feu avec un désir de rencontrer son Esprit se fait avec beaucoup d'humilité. Le chamanisme permet cette rencontre, il offre des outils pour la provoquer et la vivre, si on en a l'élan. J'avais un certain rapport à cet élément magique jusque là. Je lui prêtais du pouvoir et j'avais beaucoup d'amour pour lui. Depuis mon dernier week-end de pratiques (avec Eric des Forges de Sylva) j'ai un nouvel élan et un renouveau d'humilité : le Feu est un média de transformation puissant, il vient brûler ce qui m'encombre, mais peut aussi brûler si fort que je me perds, que je perds le rapport à mon vivant. M'asseoir près de lui, l'écouter chanter, en prendre soin toute une nuit, marcher sur lui, danser avec lui… sont des pratiques qui me relient à lui. Et qui ne suffisent pas. Ce sont des pratiques à renouveler. Encore, et encore. C'est aussi ça, le chamanisme : la répétition, pour entrer dans ses profondeurs, en brûlant une couche à la fois, pour atteindre à la suivante, et la suivante encore. La transformation est parfois fulgurante, parfois discrète, mais elle est là, toujours, au cœur de soi.
Le Feu brûle sur la Terre depuis que la Terre existe. Les premiers hommes ont doucement appris à l'apprivoiser, à en prendre soin pour recevoir le cadeau de sa présence, et ne plus subir uniquement les foudres de sa colère. Ça demande beaucoup de conscience, d'écoute, de patience. Et depuis ces premiers feux de l'humanité, le Feu passe de foyer en foyer, mais c'est le même Feu que celui des origines. Il n'y a qu'un seul Feu. D'un foyer à l'autre, un geste, un acte, permet de faire ce lien, de se souvenir de cela.
Et le Feu entre en nous, petit à petit. En fait, il y est déjà à notre naissance. C'est l'élan de vie, c'est la puissance vitale en nous, celle qui anime nos désirs, qu'ils soient sexuels ou autres. Prendre soin de ce Feu-là également, en soi, avec autant d'amour et d'attention qu'on le ferait pour n'importe quel foyer dont on voudrait maintenir la flamme vivante pour survivre. Maintenons donc en nous cette Flamme de Vie, soyons Feux pour le monde, et dansons autour des feux de camps (prochain départ pour ce voyage-là le 18 mai en Isère), tambours à la main, joie au cœur.
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